Mon ami se fait arnaquer sur Facebook

Internet est comparable à une grande ville en expansion permanente. Ses constructions bigarrées vont de la haute tour splendide aux couloirs sombres où sévissent des truands. Comme toute grande ville, il couve jalousement ses secrets. Loin des regards curieux et de l’ignorance du néophyte. Ses habitants, souvent anonymes, ne sont pas toujours bien intentionnés. Seulement, tout le monde ne le sait pas !
Tout a commencé par un coup de fil. Un ami voulait que je l’aide à rédiger une lettre administrative. Secret d’État m’a-t-il dit. « Tu n’en parles à personne ! » Étant libre et grand fan de James Bond, j’ai frénétiquement acquiescé. Trente minutes plus tard, il est dans ma chambre d’étudiant.
Pour lui écrire sa correspondance, il me fallait plus d’informations. Qui est le destinataire ? Le pourquoi de la lettre…
C’est alors que j’apprends qu’il est invité par l’Association canadienne pour le développement et la santé (ACDS) à une conférence à Montréal. Il lui fallait prendre contact pour confirmer sa participation et s’enquérir des modalités et exigences.
Je lui ai adressé mes plus vives félicitations. Voyant qu’il peut se confier à moi, il m’avoue que le destinataire est une femme qu’il a rencontrée un mois plus tôt sur les réseaux sociaux. Il me passe sa tablette pour que je puisse constater par moi même la teneur, mais aussi la chaleur de leurs étreintes virtuelles.
La rapidité avec laquelle ils ont passé des présentations à l’intimité m’a un peu intrigué. Mais jusque-là, rien d’inquiétant. Pas même le fait qu’une coordinatrice générale écorche la langue de Molière avec la dextérité d’un élève de primaire. Cependant, l’adresse e-mail a été la goutte de trop ! Pourquoi une telle organisation utiliserait un compte Gmail mal orthographié pour ses correspondances officielles ? Pourquoi le compte Facebook de cette femme ne contient qu’une seule photo, pas une publication ni même d’amis en commun avec mon ami ?
Voulant aller plus loin, j’ai fait une petite recherche sur l’association sur Google. Eh bien, j’ai rien trouvé ni sur le nom de cette femme encore moins de site officiel pour son organisation. Il s’est fait évident que je me trouve fort probablement en face d’une arnaque ! Comment refroidir son enthousiasme ?
Précautionneusement, je le mets au parfum des différentes formes d’escroquerie sur Internet et lui fait part de mes préoccupations. Brusquement, il devient nerveux. Franchement, il m’affirme son désintérêt pour mes informations.
Il faut dire qu’en Haïti, voyager est dans la perception commune synonyme de mobilité sociale, d’opportunités de travail et d’études pour les étudiants. Ainsi, mon ami a peut être interprété mon scepticisme pour de la jalousie. Comment d’un côté garder son amitié et de l’autre, le dissuader de s’investir dans la chance de sa vie ? Comment l’empêcher d’envoyer par Western Union ses économies ? Certaines leçons de vie s’apprennent sur le tas ! Je laisse faire.
Ensemble, plus tard, nous participerons sûrement à une manifestation pour inviter le Parlement haïtien à prendre conscience de la délinquance qu’occasionnent les Technologies de l’information et de la communication (TIC). Espérons que finalement, il décidera de légiférer sur ces formes de crimes modernes.
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